jérémiade #13

Une variante de la jérémiade #1

Mon amie L. qui dit: “Si j’ai pas le… …je vais avoir les boules sévère.” Visiblement, cette expression a la vie dure. Pardon. La dent longue. Non, c’est pas ça. Vous voyez ce que je veux dure, non? Ce que je veux DIRE. Ah non, vous vous en battez les ovaires, vous vous en caillez les michous, bref… Quelle langue, la langue de Walter! Même quand elle est mal utilisée, elle est bell… pas mal quoi. Mais je dis Grèce. Ben quoi? C’est les vacances!

jérémiade #12

Un manuel d’utilisation pour la vie:

“Félicitations! Vous venez d’acquérir la vie. Un produit de l’univers. Votre produit peut déteindre c’est normal. Assurez vous d avoir acheté votre vie auprès d’un vendeur agréé. Maintenant avec l’option premium. La vie®*.

*Si vous êtes né pauvre nous ne pouvons garantir en aucun cas le résultat.”

jérémiade #11

Je vais écrire un livre de développement personnel:

“La vie à ma taille. Être acteur de son changement même en dehors des cabines d’essayage.”

jérémiade #10

“Il n’y a rien de mieux qu’une bonne inflation avant d’aller se coucher.” Freud et Marx doivent se réjouir dans leurs tombes.

jérémiade #7

Un grand Noir dans le métro. Il parle fort, s’adresse à tout le monde et à personne.

“Le Sheitan va venir. Nos pères étaient les premiers ambassadeurs d’Afrique. Tous ceux qui font les malin ça va leur tomber dessus. Je n’aime pas la facilité. Je n’aime pas l’injustice. Nous on allait pas voir les putes. On est pas des rappeurs nous.  Ils nous voient comme ça parler fort dans le métro et ils croient qu’on est fous. Il y a des femmes que je ne touche pas. nos femmes sont greffières au grand tribunal d’instance. Celui qui croit qu’on est fou il est encore plus bête et plus naïf que nous.

On a des couilles nous. Des grandes couilles. On est des négros. Des hommes d’Afrique. On a des couilles comme ça. Au pays on a dix femmes rien que pour nous…”

jérémiade #6

Paris Métro SORTIE

Ligne 9, Croix de Chavaux-Miromesnil, à 9h du matin.

Coude à coude, épaule à épaule, hanche à sac.

Beaucoup de nuques. Des nuque rasées, des nuques bien entretenues.

Tout le monde a fait un effort.
Un coup de brosse dans les cheveux résistants, un coup de peinture sur les traits fatigués.

Un bout de jambe. Un tatouage de sortie pour la première fois en ces premiers jours chauds du mois de mai.

Des livres. Des portables.

Des bouts de pages. “du mont blanc ele-… mené une joyeuse vie.”

Des mains qui s’agrippent. Des doigt tendus qui s’appuient contre des bouts de murs.

L’entre deux. Quelques uns encore au lit, d’autres déjà au travail.

Pas encore les visages crevés du soir.
Encore les gueules ternes du lundi matin.
Le vendredi soir un vague souvenir.
Qui a fait l’amour? Qui a perdu un proche ce dernier temps? Qui va mourir dans l’année? Qui apprendre à danser? Qui a peur d’aller au travail? Qui a peur de ne plus aller au travail?

“Mesdames Messieurs, votre attention svp, nous allons patienter quelques instants pour régulation. Merci!”

jérémiade #18

La piscine à la plage
L’été dernier, j’ai fait une rencontre… Alors une rencontre… Ça a changé ma vie. J’ai rencontre Mich. On s’est rencontrés en faisant de la natation. D’abord j’ai nagé tout seul, et à un moment donné, Mich est arrivé comme ça, l’air de rien et m’a demandé si je voulais pas nager avec lui. Et moi, je sais pas pourquoi, sur un coup de tête j’ai dit oui. Mich n’était pas tout seul. Il était avec deux collègues, qui nous ont laissés rapidement. C’est que Mich travaillait, ce jour là. Donc, grâce à la discrétion de ses collègues, Mich et moi on s’est retrouvés tous seuls dans les vagues vendéennes. Alors, je ne sais pas si vous avez déjà fait trempette avec un pompier dans l’atlantique… C’est quelque chose. Et tous les deux on a tout de suite sentis qu’il avait quelque chose de fort entre nous. D’abord des vagues de trois mètres. Puis la ligne qui attachait Mich à ses collègues à la plage. Et eux, d’ailleurs probablement jaloux de notre intimité houleuse, ils tiraient comme des fous pour nous ramener sur la plage. À un point qu’on n’arrivait plus à sortir la tête de l’eau. Et puis Mich, il a fait ce qui m’a prouvé qu’il tenait, comme moi à vivre à fond ce moment dans l’eau froide, Mich il a ouvert son harnais et a lâché la ligne. Il m’a dit plus tard, dans l’ambulance, que c’était pour pas qu’on se noie, mais je sais lire entre les lignes, moi. Vraiment seuls maintenant, emportés à nouveau au large par le courant et les vagues, Mich et moi, on s’est regardés, puis on s’est tenus la main, c’était évident qu’on voulait la même chose. Survivre, d’abord, bien sur, mais derrière tout ça il y avait autre chose. Les rochers. Et les méduses. J’ai du mal à rendre justice à ce moment avec les mots, il fallait être là, nous voir dans l’eau, Mich et moi, main dans la main, épaule à épaule, balloté par les vagues, immergés à intervalles irréguliers par la barre des vagues.
Toutes bonnes choses ont une fin, et Mich, il était au travail quand même, il n’était pas là pour s’amuser. Et je crois aussi qu’il n’assumait pas complètement. Il n’a pas osé de mettre tout le paquet pour cette première rencontre. Ce qu’il était pudique, Mich. Il m’a avoué après qu’il avait préparé plus pour moi, que l’hélico pour nous sortir de là était déjà en route. Il a du se dire que ça faisait peut-être trop pour une première rencontre et du coup on a continué à nager jusqu’à mettre pied sur terre ferme. Donc Mich et moi on s’est retrouvés sur cette plage idyllique, complètement désert (si on fait abstraction des dizaines de pompiers, des policiers et de la centaine de badauds en maillot de bain qui filmaient avec leur téléphone portable). Et là, Mich m’a abandonné. Je pense que le regard des autres était trop fort, ou peut-être était-ce la tristesse que ça n’allait pas aller plus loin entre nous, lui le pompier-plongeur qui sauve des vies et moi, l’artiste-branleur qui se noie.
Les collègues de Mich se sont mis à me toucher à leur tour, à me couvrir d’attention et d’une couverture chauffante, ils me chauffaient bien, quoi. Il y avait Gui-Gui, Jojo et les autres. Mich est quand même venu me voir dans l’ambulance pour dire au revoir. On s’est mis d’accord qu’on n’allait plus se voir, du moins pas dans des circonstances aussi engageantes. Une fois mon Parkinson temporaire passé et ma température remonté dans des sphères mesurables par des thermomètres, je me suis rendu compte: Je l’avais échappé belle. Donc merci à Mich et ses collègues sans lesquels ce texte serait un texte posthume. Je vous remercie de m’avoir lu et faites attention à vous! C’est pas tous les jours qu’il y a un Mich qui vous sort de là.


(En hommage aux pompiers de Sables-d’Olonne. Le 4 aout 2015, j’ai failli mourir noyé. Ils en ont décidés autrement.)

jérémiade #5

J’aime beaucoup les mots qui ne sont utilisés que par les morts. Forniquer est un mot qui me plait fort bien. Personne de vivant de nos jours dirait qu’il “forniquerait”. Mais quel mot formidable! Quelle vigueur du verbe! Quel raid… Bref: Forniquons juqu’à ce que mort s’ensuive.